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Fabio Celestini ferait-il un bon entraîneur des Young Boys?

Fabio Celestini young boys
Le technicien de 46 ans a tout pour plaire sur le papier.Image: Keystone/Shutterstock

Fabio Celestini est-il trop «tronchu» pour entraîner Young Boys?

Le coach vaudois du FC Lucerne est cité parmi les candidats à la succession de Gerardo Seoane, ce qui ne le rend pas pour autant taillé pour le poste.
02.06.2021, 11:2603.06.2021, 17:33
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Les Young Boys reprendront les entraînements le 15 juin avec un nouvel entraîneur dont on ne connaît pas encore l'identité, mais déjà le profil: il défendra un style de jeu offensif tout en faisant progresser ses joueurs. C'est l'idée du football prôné par le directeur sportif bernois Christoph Spycher, et ce que fait de mieux Fabio Celestini: le coach du FC Lucerne base sa stratégie sur la «possession active» (lire plus bas) en exploitant tout le potentiel de ses joueurs.

Fiche bio

🐣 Naissance: Fabio Celestini voit le jour le 31 octobre 1975 à Lausanne.
Parcours en club: Il apprend le football comme milieu offensif au LS puis quitte la Suisse pour progresser. Il brille en milieu récupérateur sous les maillots de Troyes, Marseille, Levante et Getafe. Son autorité naturelle le désigne souvent comme capitaine. Il arrête sa carrière en 2010.
🇨🇭Parcours en sélection: Il totalise 35 apparitions internationales pour deux buts dont un, très précieux, en 2002 en Irlande. Celestini était entré sur le terrain deux minutes avant de donner la victoire à l'équipe de Suisse (2-1), la plaçant idéalement dans la course à l'Euro 2004.
👨‍🏫Parcours sur le banc: Sa carrière de coach commence réellement en 2014 lors de son arrivée au LS, qu'il fait remonter en Super League un an après. Approché par Saint-Etienne, il reste en Suisse pour diriger Lugano puis Lucerne, où il évolue actuellement.

Spycher et Celestini sont faits pour se rencontrer. Alain Joseph en est convaincu depuis deux ans. «J’avais croisé le directeur sportif des Young Boys un peu par hasard en 2019. Nous étions venus sur le sujet des entraîneurs de manière informelle, et j’avais cité le nom de Fabio. J’ai toujours dit qu’il avait le bagage pour devenir un bon coach, pour autant qu’il accepte l'idée de pouvoir progresser et acquérir de l'expérience.»

Ce que ne dit pas Alain Joseph mais qu'il pense très fort, c'est que son ancien entraîneur au Lausanne-Sport est du genre têtu. Que c'est une tronche. «Un gros caractère», résume Jérémy Manière, qui a évolué sous les ordres de Fabio Celestini au LS. Le genre de profil pas vraiment lisse qui pourrait mal cadrer dans le paysage des Young Boys, une institution ultra hiérarchisée où l'entraîneur ne doit s'occuper que de la première équipe.

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Seoane et Celestini en 2019. Image: KEYSTONE

Ce serait suffisant pour de nombreux entraîneurs mais pas pour Celestini. «Fabio prend une place plus importante que celle de simple coach, estime son ami Pablo Iglesias. Au LS, il s'était mis à disposition du club pour inculquer sa philosophie de jeu aux juniors.» Iglesias préfère prévenir: «Si on engage quelqu'un comme lui, il faut lui laisser carte blanche dans le choix des joueurs, le système et l'animation.» Ce n'est pas la tendance des grandes équipes et il le sait. «Avant, on prenait un entraîneur pour qu'il donnait un style au club. Maintenant, le club choisit un coach qui s'adapte à sa philosophie.»

YB vit une période de profonds bouleversements, avec le départ de Seoane et les opérations du capitaine (Lustenberger) et du meilleur buteur (Nsame). C'est peut-être le meilleur moment pour bâtir quelque chose de neuf. Jérémy Manière verrait bien Celestini en architecte du futur bernois. «J'ai l'impression qu'il a mis un peu d'eau dans son vin avec le temps. Et puis il a toujours été intelligent. S'il signe à Berne, il saura qu'il ne pourra pas tout révolutionner.» Manière en est de toute façon persuadé: «Fabio finira tôt ou tard dans un grand club». Alors pourquoi pas maintenant? «Je le verrais très bien à Berne.»

C'est quoi, le style Celestini? ⚽

«Il veut que son équipe maîtrise le ballon et domine l'adversaire grâce à son jeu de possession», renseigne Alain Rochat. Une possession active qui doit être rentable, c'est à dire permettre à son équipe de porter rapidement le danger vers le but adverse. «Son idée, c'est de construire depuis l'arrière pour aspirer l'adversaire et attaquer très vite ensuite», schématise Pablo Iglesias.

Alain Rochat aussi. «Il pourrait y avoir une bonne alchimie entre lui et les joueurs de qualité des Young Boys», souligne l'ancien défenseur de La Pontaise. Car c'est l'une des forces de Celestini: fédérer un groupe autour d'un projet commun.

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Il a fêté la victoire en Coupe le mois dernier au milieu de ses joueurs.Image: KEYSTONE

Une ambition qui ne va pas sans exigences. Celestini attend beaucoup de ses hommes. «Il nous entraînait en Challenge League comme si on était le Real Madrid, se souvient Manière, flatté par tant de reconnaissance. Il accordait une importance aux petits détails. Il s'investissait corps et âme.» Au mépris de sa santé («il avait tellement donné à Lausanne qu'il était pas loin du burn-out», rappelle Iglesias) et de sa vie de famille.

Fabio Celestini a des principes de jeu dont il ne déroge pas. «C'est presque obsessionnel», sourit Jérémy Manière, qui relate cette anecdote: «Il y a cinq saisons, nous avions affronté YB chez lui. Les Bernois mettaient énormément de pression, mais Fabio nous avait demandé de ressortir proprement les ballons depuis l'arrière et c'est ce que nous avions essayé de faire durant tout le match, malgré quelques buts bêtes encaissés sur des erreurs. On avait perdu lourdement 7-2. À la fin du match, il ne nous avait pas fait de reproches. Il nous avait au contraire dit: «Le score est large, mais je suis fier de vous car vous avez essayé de jouer et ça va finir par payer».»

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Lors de la saison 2016-17 au LS.Image: KEYSTONE

À cette époque, le Lausannois débarquait sur les terrains d'entraînement avec un ballon et un drone. Les séances étaient filmées dans le ciel de la Blécherette entre le passage de deux avions, puis décortiquées sur ordinateur. La vue aérienne offrait un nouvel angle d'observation au technicien, qui pouvait ainsi chasser les moindres détails.

Tout était savamment calculé. Certains joueurs l'ont vécu comme un manque de souplesse, d'autres y ont vu le signe d'une haute exigence de lui-même et des autres. La vérité est sans doute un mélange des deux ressentis.

«Fabio est un gagnant qui a de la peine à sortir de ses idées. Quand il en a une en tête, il fait tout pour y arriver»
Alain Rochat

«Ce n'est pas facile d'être son ami, reconnaît Pablo Iglesias avec bienveillance. Fabio, ce n'est pas le genre de personne qui va t'appeler pour te souhaiter un bon anniversaire. S'il te contacte, c'est pour une bonne raison, parce qu'il y a quelque chose au bout.» D'où une réputation tourmentée, surtout en Suisse romande. «C'est parce qu'il est dans son monde, songe Iglesias. Son degré d'exigence dans son métier, beaucoup ne l'ont pas dans le leur. Quand il voit que tu ne peux pas lui amener quelque chose dans son domaine... Il ne va pas y passer la nuit. Il ne perd pas de temps avec des gens qu'il ne juge pas intéressants.» Lui ne s'en formalise pas. «Je l'aime et l'accepte tel qu'il est.»

Il paraît que c'est plus facile de l'apprécier aujourd'hui; que les années l'ont adouci, à moins que ce ne soit les cours de danse latine. «Je le sens beaucoup plus à l'écoute du groupe et des joueurs», relève Iglesias.

L'entraineur Fabio Celestini, gauche, et le president Alain Joseph, droite, s'expriment lors d'une conference de presse au debut de la saison 2016-2017 de football de la Super League du ...
Celestini et Joseph au LS en 2016.Image: KEYSTONE

Alain Joseph le trouve aussi changé.

«De notre expérience commune, je retiens 90% de positif et 10% de choses améliorables. Mais je pense qu'il a mûri avec le temps. Les différents clubs dans lesquels il a entraîné lui ont permis d'acquérir une expérience complémentaire indispensable pour devenir un vrai bon entraîneur. Au début, Fabio était bon; maintenant, il est très bon. Il a le profil pour entraîner le meilleur club de suisse car il a une culture footballistique, une culture des langues, et qu'il est travailleur. Et puis il connait extrêmement bien le football et ses rouages.»

Si Celestini rejoignait YB, il lui resterait un dernier problème à surmonter: le revêtement synthétique du stade de Suisse, auquel il ne goûte guère. «Ils ne vont pas changer la pelouse pour lui», prévient déjà Joseph en riant. Manière pense que ce ne sera de toute façon pas nécessaire. Il rappelle d'abord que «tous les acteurs du football, s'ils sont honnêtes, préfèrent une bonne pelouse à un terrain synthétique», ensuite que la philosophie du coach vaudois s'accomoderait bien au plastique.

«Il prône un jeu de possession propre, technique, léché. Sur un revêtement aussi lisse que le synthétique, c'est parfait»
Jérémy Manière

Fabio Celestini n'est même plus fâché avec le terrain de Berne. Au terme de la finale de Coupe contre Saint-Gall (3-1), disputée au stade de Suisse, il s'est agenouillé religieusement et a embrassé la fausse pelouse, dans ce qui pouvait s'interpréter comme la fin d'une histoire. Ou le début d'une autre.

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